Dans ce texte, le masculin est utilisé dans le seul but d’alléger le texte.
Lorsque j’ai pris part au congrès d’IBBY tenu à Athènes en Grèce en 2018, j’ai rencontré des amateurs de livres venus du monde entier. Parmi ceux-ci, celui qui m’a sans doute le plus marqué était un jeune homme népalais dynamique : Yashu Shrestha. Il s’est présenté avec un sourire engageant et se réjouissait de nouvelles amitiés et contacts qu’il avait créés avec des auteurs de différents pays. Je me suis demandé : « Comment est-ce d’être un auteur de livres pour enfants au Népal ? ». Quand j’ai habité au Yukon, je me suis parfois sentie déconnectée d’autres auteurs et d’évènements littéraires. Comment cela se passerait-il au Népal, une région du monde reculée et difficilement accessible ? J’ai récemment pu poser des questions à Yashu à propos de son métier d’auteur et sur la promotion du livre au Népal.
« Lorsque j’étais enfant, » m’a-t-il confié, « ma mère me racontait de merveilleuses histoires. Pendant que nous travaillions ensemble aux champs, j’écoutais ses histoires et je voyais de vibrantes images dans ma tête. En vieillissant, » se souvient Yashu, « une bibliothèque s’est établie dans notre village. Mais, l’acquisition de livres s’avérait difficile. Durant le Tihar, notre fête des lumières, nous nous rassemblions pour jouer le Deusi Bhailo — des danses et des chants folkloriques traditionnels. Avec l’argent récolté, nous achetions des livres pour notre bibliothèque. » À l’école, il a commencé à écrire des poèmes et des chansons. En huitième année, il a remporté un concours grâce à un de ses poèmes.
« J’aimais écrire et j’ai entrepris d’écrire pour les adultes. Mais, lorsque j’ai approché des éditeurs, ils m’ont dit que vendre des livres pour adultes au Népal était difficile. » « Nous en vendons rarement plus de 1 000 exemplaires, » lui ont avoué les éditeurs, « et cela s’avère encore plus ardu pour un nouvel auteur. » Cette information l’a bien surpris. Il s’est posé les questions suivantes : « Pourquoi les gens ne lisent-ils pas plus ? Pourquoi ne se vend-il pas plus de livres ? »
En y réfléchissant bien, Yashu a compris qu’au Népal les gens ne favorisent pas une culture de la lecture. « Mais si l’on encourageait des habitudes de lecture dès un jeune âge, les enfants deviendraient des lecteurs. Si les enfants sont exposés à des livres de qualité, ils auront envie de lire, » affirme-t-il passionnément. Il sourit et ajoute « Les enfants accoutumés à la lecture, les enfants qui ont accès aux livres, contribueront à notre pays. »
C’est ainsi que Yashu s’est mis à lire tous les livres jeunesse qu’il pouvait se procurer. Il est allé à la rencontre d’auteurs d’expérience plus âgés que lui. Il m’avoue : « Pour ce faire, j’ai dû parcourir bien des milles à vélo. » ; il les a fréquentés et les a écoutés. Il a collectionné des livres, les a lus et a appris d’eux. De plus, Yashu a interagi et joué avec des enfants de tous âges ; il s’est enquis de leurs champs d’intérêt et a développé des idées sur le genre d’histoires susceptibles de plaire aux enfants.
« Dès lors, » me déclare-t-il tout simplement, « j’ai commencé à écrire pour les enfants. Je les aime, et, au plus profond de moi-même, je reste toujours en enfant », ajoute-t-il en souriant. Tout en découvrant plus de genres — poésie, fiction et documentaires — Yashu a continué d’écrire. En parlant et en jouant avec les enfants, en profitant de la nature et de la société, il a eu de plus en plus d’idées. « Je suis un auteur », dit-il, « mais je suis aussi éditeur de livres et de revues pour enfants. »
Yashu collabore avec différents éditeurs et des ONG au Népal. Il a publié plus de 150 histoires pour enfants. « J’ai été le premier à publier des livres sans mots pour le marché népalais, » affirme-t-il fièrement, en précisant qu’au Népal le nombre d’éditeurs de livres et de revues jeunesse est très limité. « Ces habitudes de lecture ne commencent qu’à se développer, » explique-t-il tout en ajoutant qu’il a bon espoir que les éditeurs népalais du futur pourront survivre au sein d’un marché plus fort.
Yashu signale que le Népal offre plus de 4 500 titres jeunesse. Ce nombre comprend des traductions internationales ainsi que plusieurs titres démodés. Il se réjouit du fait que de plus en plus d’artistes souhaitent illustrer des livres jeunesse népalais bien que de pouvoir vivre de leur travail leur soit toujours ardu.
Au Népal, des équivalents du Canadian Children’s Book Centre et d’organismes semblables qui soutiennent la littérature jeunesse n’existent pas. Yashu me dit qu’afin de promouvoir des habitudes de lecture auprès des parents, des enseignants et des enfants, le gouvernement et les ONG préparent peu à peu des festivals du livre et des initiatives comme des conférences sur la littérature jeunesse et des ateliers de concert avec des auteurs et des éditeurs.
« Le gouvernement devrait développer un éventail d’activités pour encourager une culture de la lecture dans les écoles et à la maison afin de soutenir les auteurs, les illustrateurs et les éditeurs » Yashu me confie-t-il avec mélancolie, « L’éducation ne devrait pas se limiter à quelques manuels scolaires. »
Grâce à son travail acharné et à son dévouement, Yashu Shrestra aspire à contribuer autant qu’il le peut à la littérature jeunesse du Népal. Il m’avoue: « Je souhaite que chaque enfant népalais ait la chance de lire des livres pour enfants du monde entier et que la littérature népalaise soit diffusée dans plusieurs pays ! »
Et, bien entendu, c’est pour cette raison précise qu’il se sentait heureux de participer au Congrès mondial d’IBBY et de créer des liens durables.
Margriet Ruurs est une autrice canadienne qui a plus de 40 livres jeunesse à son actif. Elle partage son amour des voyages et des livres sur Globetrotting Booklovers : www.globetrottingbooklovers.com
Découvrir la littérature jeunesse du Népal
Une contribution de Margriet Ruurs
Dans ce texte, le masculin est utilisé dans le seul but d’alléger le texte.
Lorsque j’ai pris part au congrès d’IBBY tenu à Athènes en Grèce en 2018, j’ai rencontré des amateurs de livres venus du monde entier. Parmi ceux-ci, celui qui m’a sans doute le plus marqué était un jeune homme népalais dynamique : Yashu Shrestha. Il s’est présenté avec un sourire engageant et se réjouissait de nouvelles amitiés et contacts qu’il avait créés avec des auteurs de différents pays. Je me suis demandé : « Comment est-ce d’être un auteur de livres pour enfants au Népal ? ». Quand j’ai habité au Yukon, je me suis parfois sentie déconnectée d’autres auteurs et d’évènements littéraires. Comment cela se passerait-il au Népal, une région du monde reculée et difficilement accessible ? J’ai récemment pu poser des questions à Yashu à propos de son métier d’auteur et sur la promotion du livre au Népal.
« Lorsque j’étais enfant, » m’a-t-il confié, « ma mère me racontait de merveilleuses histoires. Pendant que nous travaillions ensemble aux champs, j’écoutais ses histoires et je voyais de vibrantes images dans ma tête. En vieillissant, » se souvient Yashu, « une bibliothèque s’est établie dans notre village. Mais, l’acquisition de livres s’avérait difficile. Durant le Tihar, notre fête des lumières, nous nous rassemblions pour jouer le Deusi Bhailo — des danses et des chants folkloriques traditionnels. Avec l’argent récolté, nous achetions des livres pour notre bibliothèque. » À l’école, il a commencé à écrire des poèmes et des chansons. En huitième année, il a remporté un concours grâce à un de ses poèmes.
« J’aimais écrire et j’ai entrepris d’écrire pour les adultes. Mais, lorsque j’ai approché des éditeurs, ils m’ont dit que vendre des livres pour adultes au Népal était difficile. » « Nous en vendons rarement plus de 1 000 exemplaires, » lui ont avoué les éditeurs, « et cela s’avère encore plus ardu pour un nouvel auteur. » Cette information l’a bien surpris. Il s’est posé les questions suivantes : « Pourquoi les gens ne lisent-ils pas plus ? Pourquoi ne se vend-il pas plus de livres ? »
En y réfléchissant bien, Yashu a compris qu’au Népal les gens ne favorisent pas une culture de la lecture. « Mais si l’on encourageait des habitudes de lecture dès un jeune âge, les enfants deviendraient des lecteurs. Si les enfants sont exposés à des livres de qualité, ils auront envie de lire, » affirme-t-il passionnément. Il sourit et ajoute « Les enfants accoutumés à la lecture, les enfants qui ont accès aux livres, contribueront à notre pays. »
C’est ainsi que Yashu s’est mis à lire tous les livres jeunesse qu’il pouvait se procurer. Il est allé à la rencontre d’auteurs d’expérience plus âgés que lui. Il m’avoue : « Pour ce faire, j’ai dû parcourir bien des milles à vélo. » ; il les a fréquentés et les a écoutés. Il a collectionné des livres, les a lus et a appris d’eux. De plus, Yashu a interagi et joué avec des enfants de tous âges ; il s’est enquis de leurs champs d’intérêt et a développé des idées sur le genre d’histoires susceptibles de plaire aux enfants.
« Dès lors, » me déclare-t-il tout simplement, « j’ai commencé à écrire pour les enfants. Je les aime, et, au plus profond de moi-même, je reste toujours en enfant », ajoute-t-il en souriant. Tout en découvrant plus de genres — poésie, fiction et documentaires — Yashu a continué d’écrire. En parlant et en jouant avec les enfants, en profitant de la nature et de la société, il a eu de plus en plus d’idées. « Je suis un auteur », dit-il, « mais je suis aussi éditeur de livres et de revues pour enfants. »
Yashu collabore avec différents éditeurs et des ONG au Népal. Il a publié plus de 150 histoires pour enfants. « J’ai été le premier à publier des livres sans mots pour le marché népalais, » affirme-t-il fièrement, en précisant qu’au Népal le nombre d’éditeurs de livres et de revues jeunesse est très limité. « Ces habitudes de lecture ne commencent qu’à se développer, » explique-t-il tout en ajoutant qu’il a bon espoir que les éditeurs népalais du futur pourront survivre au sein d’un marché plus fort.
Yashu signale que le Népal offre plus de 4 500 titres jeunesse. Ce nombre comprend des traductions internationales ainsi que plusieurs titres démodés. Il se réjouit du fait que de plus en plus d’artistes souhaitent illustrer des livres jeunesse népalais bien que de pouvoir vivre de leur travail leur soit toujours ardu.
Au Népal, des équivalents du Canadian Children’s Book Centre et d’organismes semblables qui soutiennent la littérature jeunesse n’existent pas. Yashu me dit qu’afin de promouvoir des habitudes de lecture auprès des parents, des enseignants et des enfants, le gouvernement et les ONG préparent peu à peu des festivals du livre et des initiatives comme des conférences sur la littérature jeunesse et des ateliers de concert avec des auteurs et des éditeurs.
« Le gouvernement devrait développer un éventail d’activités pour encourager une culture de la lecture dans les écoles et à la maison afin de soutenir les auteurs, les illustrateurs et les éditeurs » Yashu me confie-t-il avec mélancolie, « L’éducation ne devrait pas se limiter à quelques manuels scolaires. »
Grâce à son travail acharné et à son dévouement, Yashu Shrestra aspire à contribuer autant qu’il le peut à la littérature jeunesse du Népal. Il m’avoue: « Je souhaite que chaque enfant népalais ait la chance de lire des livres pour enfants du monde entier et que la littérature népalaise soit diffusée dans plusieurs pays ! »
Et, bien entendu, c’est pour cette raison précise qu’il se sentait heureux de participer au Congrès mondial d’IBBY et de créer des liens durables.
La section népalaise d’IBBY : http://nepalbalsahitya.org.np/
Margriet Ruurs est une autrice canadienne qui a plus de 40 livres jeunesse à son actif. Elle partage son amour des voyages et des livres sur Globetrotting Booklovers : www.globetrottingbooklovers.com
Traduction : Suzanne Nesbitt
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